Un impact sur la santé humaine
Deux récentes études ont estimé le nombre d’infections dues à des bactéries résistantes. Pour la première, du centre européen de prévention et contrôle des maladies (ECDC), les infections à bactéries résistantes touchent plus de 120 000 cas par an en France, et sont associées à plus de 5500 décès. La deuxième, une étude française de 2019, estime les bactéries résistantes responsables de plus de 130 000 infections en 2016 en France.
En Europe, 33 000 personnes meurent chaque année d’infections résistantes aux antibiotiques. Le poids de ces infections est comparable à celui de la grippe, de la tuberculose et du VIH/SIDA combinés.
Selon des projections récentes de l’OCDE, les infections résistantes aux traitements antibiotiques pourraient tuer quelque 2,4 millions de personnes en Europe, en Amérique du Nord et en Australie entre 2015 et 2050 si l’on ne redouble pas d’efforts pour enrayer l’antibiorésistance. En France, d’ici 2050, on estime que 238 000 personnes mourront des suites de l’antibiorésistance.
Des interventions médicales du quotidien risquent également d’échouer ou de ne plus pouvoir être effectuées (réduction de fractures, traitement du cancer par chimiothérapie, opérations courantes…) à cause de l’inefficacité des antibiotiques, utiles pour mener à bien ces interventions.
Un impact sur la santé animale
Le mauvais usage des antibiotiques compromet l’efficacité des traitements pour les animaux ainsi que leur bien-être.
En santé animale, 96 % des antibiotiques sont consommés par les animaux destinés à la consommation humaine et 4 % par les animaux domestiques.
La législation européenne a interdit depuis 2006 l’utilisation des antibiotiques comme facteurs de croissance chez les animaux de rente, ce qui a réduit le niveau d’exposition aux antibiotiques des productions animales, et par conséquent, des humains qui les consomment.
La mobilisation des éleveurs, des propriétaires d’animaux de compagnie, des vétérinaires et de l’ensemble des acteurs sanitaires est indispensable pour continuer à relever le défi de la lutte contre l’antibiorésistance.
Lancé en 2012, le plan Ecoantibio a commencé à donner des résultats encourageants dans la réduction de l’antibiorésistance. Il visait à réduire de 25 % en cinq ans l’usage des antibiotiques dans l’élevage et ainsi préserver l’efficacité thérapeutique des antibiotiques. Entre 2012 et 2016, l’utilisation d’antibiotiques vétérinaires, pour toutes les espèces animales, a diminué de 37 %, grâce à la mobilisation de tous les acteurs. Alors qu’un deuxième plan Ecoantibio a été lancé en 2017, ce bilan positif doit être conforté.
Un impact sur l’environnement
L’antibiorésistance est aussi liée en partie à la contamination des milieux naturels et de la faune sauvage. Ceux-ci deviennent des réservoirs de gènes de résistance, mais également de véritables laboratoires de sélection de nouvelles résistances, transmissibles à l’homme.
Dans une moindre mesure, l’antibiorésistance engendrerait la pollution de la faune et de la flore, et la diffusion de résidus bactériens dans les fleuves, les champs ou les nappes phréatiques.
Des études sont actuellement en cours sur les mécanismes de développement de l’antibiorésistance dans l’environnement, ainsi que sur l’état de la contamination des différents milieux en antibiotiques, résidus et bactéries résistantes. Différents projets de recherche ont été lancés sur l’antibiorésistance dans l’environnement et afin d’élaborer des solutions efficaces pour lutter contre la contamination des milieux.
Un impact sur l’économie
Selon l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM), la surconsommation d’antibiotique en France engendre une dépense supplémentaire pour le système de santé français, par rapport à nos voisins européens, qui varie de 70 à 440 millions d’euros par an, selon le scénario retenu (scénario 1 : Consommation moyenne d’antibiotiques mesurée en ville dans l’ensemble des pays européens, scénario 2 : Consommation moyenne des 12 pays européens les plus développés, scénario 3 : Consommation moyenne des trois pays les plus « vertueux », en termes de consommation antibiotique).
Une étude française de 2018 confirme ces chiffres. L’antibiorésistance aurait entraîné un coût global de 109,3 millions d’euros à la France en 2015.
L’antibiorésistance a également un impact sur les économies de nos pays. La menace que représentent les infections bactériennes résistantes aux traitements antibiotiques dans le monde, en particulier dans les pays les plus pauvres, serait susceptible de provoquer d’ici 2050 un impact financier comparable à la crise financière de 2008 selon une étude de la Banque mondiale publiée en 2016. Les projections économiques de la banque mondiale indiquent que le PIB mondial pourrait diminuer chaque année de 1,1 à 3,8 %, en raison de l’impact de cette crise sanitaire sur le commerce mondial, le coût des soins de santé et sur l’élevage.
Des ressources financières et des moyens humains supplémentaires devront être engagées pour traiter les patients souffrant de résistance aux antibiotiques (matériel, coût de la prise en charge, traitements…). Les complications engendrées par l’antibiorésistance pourraient coûter en moyenne jusqu’à 3,5 milliards dollars par an dans les 33 pays considérés si rien n’est fait pour intensifier la lutte contre les « superbactéries » selon la récente étude de l’OCDE.