Publication du bilan à mi-parcours de la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens
Actualités
– Le bilan à mi-parcours
– La 2ème stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens
– Le plan d’actions de la SNPE2
– La 2ème stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens en 10 points
Deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens : quel bilan à mi-parcours ?
Adoptée en 2019, la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE 2) est une composante du quatrième plan national santé environnement (PNSE 4), copilotée par le ministère de la Transition écologique et le ministère chargé de la Santé. Elle a un objectif principal de réduire l’exposition des populations et de l’environnement aux perturbateurs endocriniens, en renforçant la réglementation, la formation et l’information et en améliorant la connaissance sur ces substances.
La SNPE 2 : une stratégie interministérielle qui s’inscrit dans un cadre européen
Afin de protéger au mieux la population et l’environnement, les perturbateurs endocriniens font l’objet, depuis plusieurs années, d’un encadrement à l’échelle européenne.
Depuis 2008, le règlement communautaire REACH relatif à l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des produits chimiques sur le marché européen permet d’identifier des substances comme perturbateurs endocriniens (PE). De plus, la Commission européenne a adopté en 2018 les critères permettant d’identifier une substance comme étant un perturbateur endocrinien au titre des réglementations sur les produits phytopharmaceutiques et sur les produits biocides.
En 2020, la Commission européenne a publié la Stratégie européenne sur les produits chimiques, à laquelle la France a largement contribué. Cette stratégie souligne la nécessité de définir de manière harmonisée les perturbateurs endocriniens dans la réglementation européenne. L’Europe a ainsi prévu, à l’horizon 2022, d’adopter une définition harmonisée des perturbateurs endocriniens applicable à tous les secteurs pertinents, ainsi qu’un principe d’interdiction de ces substances dans les produits de consommation courante, sauf si elles se révèlent essentielles pour la société. Cette définition permettra de mettre en œuvre l’obligation d’étiquetage des produits contenant des PE, et ainsi de mieux informer les citoyens et les professionnels.
Dans ce cadre, la France est un des premiers pays à avoir défini une stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE) dès 2014, avec un objectif : réduire l’exposition des populations et de l’environnement à ces substances.
S’inscrivant dans la logique de la SNPE 1, la SNPE 2 s’appuie sur l’approche « Une seule santé », selon laquelle la santé de l’environnement est indissociable de la santé humaine et de la santé animale. Elle s’articule ainsi avec les autres plans et initiatives de santé publique et de protection de l’environnement et de la biodiversité, tels que le plan national santé environnement ou encore la stratégie nationale pour la biodiversité.
De nombreuses actions engagées pour réduire l’exposition humaine et environnementale aux perturbateurs endocriniens
La SNPE 2 s’articule autour de 3 axes :
– axe 1 : former et informer les citoyens et les professionnels sur les perturbateurs endocriniens et les moyens d’agir pour réduire leur exposition et celle de leurs proches ;
– axe 2 : protéger l’environnement et la population ;
– axe 3 : améliorer les connaissances sur les perturbateurs endocriniens.
Afin de répondre à ces ambitions, 38 actions de la stratégie ont d’ores et déjà été lancées depuis 2019 et de nouvelles actions seront engagées dans les mois à venir.
Concernant l’information et la formation des professionnels et du grand public :
– Le site d’information « Agir Pour Bébé » a été mis en ligne à la fin de l’année 2019 par Santé publique France. Il met à disposition des futurs et jeunes parents une information claire et vérifiée sur l’influence des environnements affectifs, sociaux, physiques et chimiques sur leur santé et celle de leur enfant. Une campagne de sensibilisation et de promotion du site internet sera lancée dans le courant de l’été 2021 afin de mieux le faire connaître auprès des professionnels de santé et du grand public.
– L’École des hautes études en santé publique (EHESP) de Rennes a ouvert à l’automne 2020 une formation en ligne sur les perturbateurs endocriniens et les risques chimiques autour de la périnatalité à destination des professionnels de santé. Une deuxième session est organisée du 12 octobre au 14 novembre 2021 (inscriptions jusqu’au 10 septembre).
– Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) a développé une stratégie de formation et de sensibilisation sur les perturbateurs endocriniens à destination des agents des collectivités en organisant des webinaires ou séminaires, dont une capitalisation a fait l’objet d’un document mis en ligne par le Centre.
Afin de réduire l’exposition de la population et de l’environnement aux perturbateurs endocriniens :
– Plusieurs études analysant la présence des perturbateurs endocriniens dans l’air, l’eau, les sols, l’alimentation et leur impact sur l’environnement, la biodiversité et la santé humaine sont menées. Par exemple, l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI) va lancer sa deuxième campagne nationale logement qui vise à déterminer l’évolution de la qualité de l’air dans les logements en France, en ciblant certains polluants émergents, comme les perturbateurs endocriniens qui n’étaient jusqu’alors pas étudiés.
– Par ailleurs, pour accélérer la sortie du le marché des substances dangereuses, la substitution des perturbateurs endocriniens a été intégrée à des appels à projets comme l’appel à projet « Résilience » lancé dans le cadre du plan France relance et des actions de sensibilisation des acteurs économiques sont en cours, auprès des pôles de compétitivité, des centres techniques industriels (CTI) et de certains centres de recherche et développement (R&D).
– Les travaux menés par l’Agence nationale de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), qui a publié une liste de substances d’intérêt du fait de leur potentielle activité endocrine ainsi qu’une sélection de substances prioritaires à évaluer dans les prochains mois et années, permettront d’alimenter le cadre réglementaire et d’effectuer des contrôles plus ciblés dans les produits de consommation courante sur la présence de perturbateurs endocriniens.
– Afin d’assurer une coordination entre agences et un partage des connaissances pour une meilleure gestion des milieux, des échanges ont été lancés entre plusieurs organismes (Ineris, Anses, OFB, BRGM, IFREMER, etc.) pour élaborer un inventaire de données sur l’imprégnation de divers milieux. Des partenaires européens seront également invités à participer à cette réflexion, notamment dans le cadre du partenariat européen PARC (Partnership for the Assessment of Risks from Chemicals).
Concernant l’amélioration des connaissances par le biais de la recherche :
– La recherche sur les perturbateurs endocriniens est portée au niveau national, notamment via le programme national de recherche Environnement-Santé-Travail (PNREST) de l’Anses, mais aussi européen, notamment dans le cadre du projet PARC qui sera lancé en 2022 après une phase de préparation pilotée par l’Anses et qui vise à faire avancer la recherche, partager les connaissances et améliorer les compétences en évaluation des risques liés aux substances chimiques en Europe.
– S’agissant des expositions de la population aux perturbateurs endocriniens et des impacts sanitaires, Santé publique France poursuit la surveillance de plusieurs indicateurs de santé reproductive comme l’endométriose, les cryptorchidies ou la puberté précoce, et souhaite élargir cette surveillance à d’autres indicateurs de santé pouvant être en lien avec une exposition aux perturbateurs endocriniens. Une consultation large d’experts et de parties prenantes va dans ce cadre être prochainement lancée par l’agence.
– Sur la surveillance de l’imprégnation de la population aux contaminants de l’environnement (dont des perturbateurs endocriniens), Santé publique France va publier en 2021 les derniers résultats de l’étude Estéban et lancera un nouveau programme national de biosurveillance début 2023. L’agence participe également aux travaux européens de biosurveillance (HBM4EU et PARC).
>> Découvrez l’ensemble des actions engagées et les actions en cours :
– le bilan à mi-parcours de la SNPE 2 – la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens en 10 points – vidéo "Tout comprendre sur la 2e stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens" |
Qu’est-ce qu’un perturbateur endocrinien ?
Un Perturbateur Endocrinien (PE) est, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), une substance chimique d’origine naturelle ou synthétique, étrangère à l’organisme et susceptible d’interférer avec le fonctionnement du système endocrinien, c’est-à-dire des cellules et organes impliqués dans la production des hormones et leur action sur les cellules dites « cibles » via des récepteurs. Les PE dérèglent le fonctionnement hormonal des organismes vivants, et ont ainsi des effets néfastes sur l’environnement et sur la santé humaine.
Les effets sur la santé d’une exposition aux perturbateurs endocriniens
Un certain nombre d’affections sont suspectées d’être la conséquence d’une exposition aux PE : baisse de la qualité du sperme, augmentation de la fréquence d’anomalies du développement des organes ou de la fonction de reproduction, abaissement de l’âge de la puberté… Les PE peuvent également provoquer des troubles de la croissance, des troubles du développement neurologique, des troubles de la fonction immunitaire ou encore l’apparition de certains cancers (cancers hormono-dépendants) et maladies métaboliques comme le diabète.
Les PE peuvent interférer sur le système endocrinien de 3 façons et dérégler le fonctionnement hormonal des organismes vivants :
– Imiter l’action d’une hormone naturelle et provoquer la réponse des cellules cibles à cette hormone ;
– Bloquer la fixation d’une hormone sur son récepteur au niveau des cellules cibles ;
– Gêner ou bloquer la production ou la régulation d’une hormone ou de son récepteur et donc modifier le signal hormonal.
Sources d’exposition aux perturbateurs endocriniens
Les PE sont présents dans différents milieux et l’exposition peut intervenir par différentes voies : ingestion, inhalation, ou contact cutané.
Pour la population générale, les principales sources d’exposition aux PE sont :
– l’ingestion : par l’alimentation si les denrées alimentaires sont contaminées par des substances présentes dans les emballages plastiques, ou par certains résidus de pesticides (céréales et végétaux contaminés via les sols agricoles) ou par par l’eau, du fait de la présence possible de résidus (certains médicaments notamment) ;
– l’inhalation : par l’air (pesticides, produits chimiques,…) ;
– le contact cutané avec des produits cosmétiques, des détergents, …
En milieu professionnel, les personnels de certains secteurs tels que ceux de l’agriculture (utilisation de produits phytopharmaceutiques), l’industrie pharmaceutique (production d’hormones) et chimique (fabrication de pesticides, de matière plastiques, etc.) peuvent être exposés à certains PE à de plus fortes doses que ne l’est la population générale. La protection des travailleurs exposés aux PE est prévue par le code du travail. Les travailleurs doivent notamment faire l’objet d’une formation, être informés sur ce sujet et disposer de moyens de protection adaptés.
Exemples de substances
– le diéthylstilbestrol (Distilbène) , responsable de malformations congénitales. Ce médicament a été prescrit en France jusqu’en 1977 et n’est désormais plus autorisé.
– certains phtalates , présents dans des produits tels que les adhésifs, huiles lubrifiantes, détergents, solvants, produits pharmaceutiques, fils et câbles électriques, produits cosmétiques.
– certains parabènes , employés comme conservateurs dans plus de 80 % des produits cosmétiques et utilisés dans les médicaments et comme additifs alimentaires, en raison notamment de leurs propriétés antibactériennes et antifongiques.
– le Bisphénol A (BPA) qui est principalement utilisé dans la fabrication de plastique (de type polycarbonate) et de résines époxydes. Il est aussi utilisé comme composant d’autres polymères et résines (polyester, polysulfone, résines vinylesters…). L’Anses a identifié près d’une soixantaine de secteurs potentiellement utilisateurs de cette substance en France et a listé de manière non exhaustive des usages, articles et préparations susceptibles de contenir du bisphénol A (câbles, mastics, adhésifs, récipients à usage alimentaire ou non, optiques de phares, articles de sports, fluides de freinage, fluides caloporteurs, matériel d’installation électrique, appareils électroménagers, dispositifs et appareils médicaux, encres d’imprimerie…)
Le BPA a été interdit dans tout conditionnement contenant, ou ustensile destiné à entrer en contact direct avec les denrées alimentaires, à partir du 1er janvier 2015 (Loi n°2012-1442 du 24 décembre 2012). La France a été à l’initiative des interdictions au niveau européen dans le cadre de différentes réglementations.
– certains composés perfluorés (PFC) , très persistants dans l’environnement, utilisés dans les traitements textiles antitaches et imperméabilisants, les enduits résistants aux matières grasses, les emballages en papier et carton alimentaires, etc.
– certains composés polybromés (ou retardateurs de flamme bromés) , très persistants dans l’environnement, utilisés pour rendre certains produits moins inflammables : plastiques, textiles (rideaux, sièges, mousses, capitonnages, etc.), équipements électriques/électroniques (circuits imprimés, câbles, téléviseurs, ordinateurs, etc.).
Perturbateurs endocriniens : un enjeu sanitaire, environnemental et scientifique majeur
Une réglementation en évolution
L’évaluation des risques sanitaires liés à l’exposition aux perturbateurs endocriniens est complexe et sujette à controverse, en raison notamment de la difficulté à définir des critères harmonisés en matière d’identification et d’évaluation du caractère PE des substances chimiques. Néanmoins, les travaux réglementaires de ces dernières années ont permis des avancées au niveau européen. Les actions de la SNPE 2 s’inscrivent dans ces évolutions réglementaires au niveau national et européen.
L’Anses est très impliquée dans les évaluations des risques des PE, en lien avec les agences des autres Etats membres. Chaque année, l’Anses évaluera 9 substances pour leur caractère perturbateur endocrinien.
>> Pour en savoir plus, consulter le site de l’Anses sur les travaux pour accélérer l’évaluation des perturbateurs endocriniens.
Le travail de l’Anses s’inscrit dans une démarche européenne ayant notamment abouti à la mise en ligne en 2020 d’un site internet "edlists.org" qui répertorie les listes des substances reconnues comme étant des perturbateurs endocriniens ou en cours d’évaluation pour leurs propriétés de perturbation endocrinienne dans l’Union européenne, ainsi que des initiatives portées par des Etats-membres sur les listes de perturbateurs endocriniens. Publié et tenu à jour par le Danemark, ce site internet, est le résultat d’une coopération entre plusieurs Etats-membres : Danemark, France, Suède, Pays-Bas, Belgique, et depuis fin 2020, l’Espagne. Il vise à compiler sur un même site des informations actualisées afin d’améliorer les connaissances et la transparence sur les perturbateurs endocriniens tout en renforçant la coopération entre les agences nationales et européennes.
Outre les difficultés rencontrées pour l’évaluation du caractère de perturbateur endocrinien des substances chimiques, d’autres facteurs complexifient encore cette évaluation :
– les faibles doses d’exposition aux PE ;
– la multiplicité des PE, leur présence diffuse dans l’environnement et les interactions possibles entre plusieurs substances dans l’organisme (« effets cocktails ») ;
– les « fenêtres d’exposition » aux PE (certaines périodes de la vie sont plus sensibles que d’autres) ;
– la nature chronique de l’exposition aux PE (expositions répétées).
Les défis de la recherche scientifique en matière de perturbateurs endocriniens
En France, le programme national de recherche Environnement-Santé-Travail (PNREST) de l’Anses finance chaque année des projets de recherche sur les PE. Le PNR EST a financé 73 projets spécifiques aux perturbateurs endocriniens sur la période 2006-2017, et 38 projets sur la période 2018-2020. Les appels génériques de l’Agence nationale de la recherche (ANR) sont également mobilisés sur les PE : entre 2005 et 2019, ces appels ont permis de financer 391 projets de recherche dans le champ général « santé environnement », dont 88 spécifiquement sur les perturbateurs endocriniens pour un montant total d’aides de 35,5 M€.
Au niveau européen, avec le programme de travail H2020, 7 lignes d’appels à projets sur la thématique Santé et Environnement, qui ont mobilisé 286 M€ d’aides, dont 50 M€ spécifiquement ciblés sur les perturbateurs endocriniens. Il est important de souligner la mobilisation progressive des acteurs français, et leur participation de plus en plus importante dans les projets.
Cette structuration autour de la Commission européenne continue dans le programme Horizon Europe. Une des premières actions, mise en place dès 2021, est la structuration d’un partenariat majeur intitulé PARC, dédié à l’évaluation des risques liés aux agents chimiques, avec un axe très fort sur la biosurveillance qui fait suite à HBM4EU. Ce partenariat devrait disposer d’un budget de 200 M€ de la Commission pour un budget équivalent mobilisé par les États-Membres et Pays Associés. L’Anses devrait assurer la coordination de ce partenariat.
Documents de référence
– Deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens
– Rapport de B. Demeneix et R. Slama « Endocrine Disruptors : from Scientific Evidence to Human Health Protection », mars 2019
– Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) Santé reproductive et perturbateurs endocriniens, SpF, juillet 2018
– Une mission d’information, commune à la commission des affaires sociales et à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, a publié en décembre 2019 un rapport parlementaire sur les perturbateurs endocriniens présents dans les contenants plastiques.
– Une mission des inspections générales a publié un rapport sur « la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens : évaluation de la mise en œuvre et propositions d’évolution », 2017
– L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a publié une expertise collective en 2011 : Synthèse de l’Expertise collective « Reproduction et environnement », Inserm 2011.
Liens utiles
– Site internet Agir pour Bébé de SpF et page spécifique sur les perturbateurs endocriniens.
– Dossier « perturbateurs endocriniens » de Santé publique France (SpF).
– Dossier "Perturbateurs endocriniens" de l’Institut national du cancer (INCa).
– Dossier "Perturbateurs endocriniens" de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).
– Dossier « Perturbateurs endocriniens » de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
– Perturbateurs endocriniens et risques de cancer (Centre Léon Bérard).